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Rencontre avec Adriaan Lokman – créateur de Flow

Créateur de Flow

Le réalisateur Adriaan Lokman nous parle de son nouveau film VR Flow, récemment récompensé par le Prix du Jury dans la cadre du 80e Festival International du Film de Venise.

Adriaan, vous êtes réalisateur et designer. Qu’est-ce qui vous a amené à travailler avec le format de la réalité virtuelle pour votre nouvelle œuvre Flow ? S’agit-il d’une adaptation de votre court-métrage éponyme, plusieurs fois primé ? Pourquoi ?

Adriaan Lokman – J’ai toujours été fasciné par la VR. Cependant, elle était moins accessible à l’époque et la vitesse de traitement de mon ordinateur ne permettait pas d’obtenir des résolutions élevées. J’ai donc opté pour la création d’une version stéréoscopique dans un premier temps. Cette expérience m’a apporté de précieuses leçons sur la gestion de la profondeur, l’animation et l’utilisation de la stéréoscopie pour améliorer la narration.

Adriaan Lokman – Après avoir terminé le film, j’ai immédiatement ressenti le besoin de développer une version VR. Je pensais qu’elle pourrait offrir une expérience encore plus immersive et impressionnante. L’itération 3D de Flow avait déjà démontré ce potentiel ; la transparence et les lignes délicates du concept donnaient une impression de profondeur remarquable. Néanmoins, ce qui distingue vraiment la VR, c’est sa capacité à vous transporter dans l’atmosphère, à évoquer la sensation de flotter avec le vent. J’avais déjà expérimenté cela dans la version cinématographique, avec un certain succès.

Adriaan Lokman – Cependant, dans une salle de cinéma traditionnelle, la conscience de l’environnement reste toujours présente. Les autres spectateurs et le plafond ne partagent pas cette sensation de légèreté.

“En revanche, la VR vous enveloppe dans un univers particulier, stimulant efficacement les sens sans les distractions des perturbations ambiantes.”

Adriaan Lokman

Dans ce film, pourquoi avez-vous choisi le vent comme support de l’ensemble de l’œuvre? Ces courants d’air visibles ont-ils une autre signification particulière pour vous?

Adriaan Lokman – Ce n’est pas que l’air ait une signification particulière pour moi, mais la fascination réside plutôt dans son importance profonde. 

Adriaan Lokman – Aux Pays-Bas, la présence du vent est constante. Nous faisons beaucoup de vélo, et chaque personne de ma génération peut raconter l’expérience qu’elle a vécue en pédalant sur une chaussée contre le vent. La voile occupe une place particulière dans mon cœur ; c’est grâce aux voiliers que nous avons construit une partie de notre richesse et de notre histoire. L’omniprésence du vent est indéniable. Son ampleur éclipse toute construction humaine et sous-tend notre existence tout entière. Pourtant, malgré son importance, il reste invisible.

Vous avez choisi de créer une expérience 3DOF, à contre-courant de la tendance actuelle de 6DOF. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous avez pris cette décision artistique ?

Adriaan Lokman – La décision n’a pas été motivée uniquement par des considérations artistiques, mais également par des considérations techniques. Nous nous sommes lancés dans la création d’une version 6DOF en utilisant Unity. Cependant, trois ans en arrière, nous avons rencontré des difficultés pour maintenir le niveau de détail souhaité dans les scènes, ce qui a rendu la poursuite de cette voie impossible. Continuer dans la direction du 6DOF aurait abouti à un style graphique nettement différent, beaucoup moins détaillé et d’apparence plus robuste. En fait, nous nous sommes efforcés d’atteindre le même niveau artistique que dans la version 3DOF, sans parvenir à “peindre” efficacement avec la qualité dynamique de l’air.

Adriaan Lokman – En outre, le principal avantage de la 6DOF aurait été la possibilité d’explorer les scènes sous différents angles, avec la liberté de se déplacer. Cependant, cette approche a engendré un problème : certains objets empêchent de voir l’action principale. Pour résoudre ce problème, il fallait construire un système capable de distinguer les priorités de la scène et de bloquer sélectivement certains éléments sans perdre de vue les nuances et l’importance de la scène.

Adriaan Lokman – À la suite de notre premier test 3DOF, les retours du département 6DOF ont indiqué que cela ressemblait vraiment à du 6DOF, tant que vous restiez dans votre fauteuil.

Quel a été le processus créatif collaboratif, en particulier en ce qui concerne le son, dans cette expérience multisensorielle ?

Adriaan Lokman – Étant donné la nature expérimentale de mon travail, qui jusqu’à présent a manqué de dialogue, l’importance du son et de la musique ne peut être surestimée, car ils servent de composantes essentielles pour faciliter la compréhension du public. Pour y parvenir, je collabore étroitement avec les compositeurs et les concepteurs sonores dès les premières phases de la production. Chaque fois que je crée une action spécifique, j’incorpore rapidement le son afin d’évaluer si le message souhaité est effectivement transmis. Cela est souvent vrai pour l’animation en général. Un animateur part de zéro, à moins qu’un réalisateur de film ne dispose déjà du son avec ses images comme base de travail.

“Avec le compositeur Erik Stok, notre collaboration ressemble à un jeu de tennis animé.”

Adriaan Lokman

Adriaan Lokman – Je produis une première pièce test à laquelle il compose de la musique. Ensuite, je modifie une deuxième pièce test pour l’aligner sur la nouvelle bande sonore créée, en la lui renvoyant pour d’autres ajustements. Le processus de conception sonore commence par une sélection d’échantillons rassemblés d’Internet. Ces échantillons me donnent une première idée de la dynamique de l’action. Pendant la post-production, les concepteurs sonores reconstruisent les bandes sonores originales, en puisant partiellement dans ces échantillons. Dans le cas de Flow, le concepteur sonore Samy Bardet a joué un rôle essentiel dans la création de sons distinctifs de vent et d’air en mouvement. La contribution de Côme Jalibert a été déterminante pour obtenir un mixage audio 3D spatialisé remarquablement convaincant.

À un moment donné, un ouragan déferle et contraste avec le calme du début de l’histoire. Ce désastre en puissance a-t-il d’autres significations ?

Adriaan Lokman – Je pense qu’une histoire a besoin de contrastes, de cette manière les scènes calmes deviennent plus calmes et les scènes violentes plus fortes. Tout au long de l’expérience, le vent, sous toutes ses formes, est une métaphore de la vie. La tempête est une métaphore d’une période turbulente de la vie de la femme.

Comment pensez-vous que la réalité virtuelle et d’autres technologies immersives puissent être utilisées dans la sphère artistique ? Et quels sont les rapports entre ces nouvelles technologies et les formes d’art traditionnelles ?

Adriaan Lokman – Je suis très motivé pour continuer à explorer de nouveaux concepts et projets dans le domaine de la VR. Cependant, je reconnais que Flow présente également de nouveaux défis à l’horizon. Je suis particulièrement fasciné par l’idée de créer une version Dome ou une expérience immersive dans un cube. Ces formats offriraient le même sentiment d’immersion qu’un casque de VR tout en permettant à des groupes de personnes de s’engager collectivement dans le contenu.

Adriaan Lokman – En plus de ces activités, je me suis lancée dans la création d’installations vidéo imprimées en 3D, qui servent de canevas pour des projections animées. J’ai hâte de fusionner cette technique avec la réalité augmentée (AR), en intégrant à la fois les dimensions visuelles et auditives. La VR, et par extension la XR, est un outil incroyable pour les artistes. Elle nous donne la possibilité de nous rapprocher considérablement de notre public, en établissant une connexion plus immédiate et plus efficace avec leurs perceptions. Avec ces outils, nous pouvons transporter les individus dans des domaines inexplorés, en franchissant les frontières habituelles. 

“Le potentiel est illimité, mais il est essentiel de reconnaître que si la technologie est transformatrice, la véritable qualité de l’art produit dépendra toujours des pouvoirs créatifs de l’artiste.”

Adriaan Lokman

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