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Rencontre avec Philippe Cohen Solal – INSIDER-OUTSIDER

Musicien, compositeur et producteur français, Philippe Cohen Solal est l’un des membres fondateurs de Gotan Project. Artiste touche-à-tout, féru de technologies, il s’inspire aujourd’hui des œuvres d’Henry Darger, figure majeure de l’Art Brut, pour concevoir son projet transmedia INSIDER-OUTSIDER entre performance live, musique et immersif.

OUTSIDER et la rencontre avec Henry Darger

Philippe Cohen Solal – INSIDER-OUTSIDER est le résultat d’un vrai coup de foudre artistique… pour Henry Darger. Cet artiste autodidacte, qui a évolué en dehors de toutes conventions de l’art moderne (« outsider »), était un génie du dessin et de la littérature et a conçu son œuvre toute sa vie sans jamais la montrer. Darger, c’est la création à l’état pur. C’est la définition de l’art brut. Il n’y a pas d’intention d’un regard extérieur ou d’une appréciation de ce qu’il fait. Il crée pour lui avant tout.

P. C. S. – J’ai découvert Henry Darger et l’art brut à l’American Folk Art Museum de New York en 2003 lors d’une tournée américaine avec Gotan Project. Par hasard, en même temps, j’ai rencontré ses ayant-droits. Il y a peu de numérique quand on parle des créations de Darger, c’est en réalité très analogique : des collages, des dessins, des textes… Son univers m’a fasciné, avec cette illustration d’un combat riche et fantasmé entre le monde des enfants et le monde des adultes. Mais, de mon point de vue, il pouvait y avoir un apport sonore et musical complémentaire : or Henry Darger avait aussi écrit des paroles de chansons ! Après une exposition rétrospective à Paris, en 2006, nous avons continué notre discussion pour en faire un projet plus global, transmedia, qui viendrait s’emparer de toutes ses créations pour en faire un spectacle musical : OUTSIDER.

Concevoir un spectacle multi-sensoriel

 P. C. S. – Au départ, avec mon collaborateur Mike Lindsay nous avons écrit la musique sur les textes des chansons de Darger, tout en diffusant une forme de panorama artisanal de ses dessins et peintures. Il y a une volonté de montrer toute l’étendue de son œuvre, grâce au numérique. C’est un univers très vintage, qui propose une forme de pop culture des années 1930 à 1960. Tout a été repris notamment depuis un recueil de plus de 15000 pages : « Dans les royaumes de l’irréel ».

P. C. S. – Notre album était prêt fin 2019, mais évidemment la Covid-19 a retardé toute possibilité de tournée. La pandémie nous a aussi donné le temps de réfléchir à d’autres idées pour exposer OUTSIDER en public, alors que les concerts étaient très limités. J’ai alors voulu utiliser l’animation 2D pour concevoir des visuels plus aboutis, et c’est là que j’ai rencontré le vidéaste Pascal Gary (aka formazero). Ensemble nous avons rencontré le collectif Rainbox, et notamment Gabriel Jacquel, pour qu’ils nous accompagnent dans la conception visuelle du projet. Nous sommes arrivés à de courts clips visuels, finalement très narratifs, autour de nos compositions musicales. Toute cette démarche nous a donné l’opportunité de creuser beaucoup plus la matière créée par Henry Darger.

 P. C. S. – Finalement nous avons pu présenter l’ensemble de notre projet au Musée d’art moderne de Paris en 2021, sous forme de performance entre Djs et Vjs, dans un mix visuel, sonore et narratif avec le comédien Denis Lavant.. Passé le temps de la pandémie, également dans une réflexion autour de nos déplacements et de l’accessibilité du projet, je me suis intéressé un peu plus à la réalité virtuelle pour développer encore plus OUTSIDER. C’est un médium que j’avais découvert plusieurs années avant, avec envie, notamment plus récemment« Le Bal de Paris ” de Blanca Li . Le voyage dans un monde qui n’existe pas, ça m’a intéressé…. Et j’avais très envie d’y retourner assez vite ! C’est une possibilité formidable d’offrir un temps suspendu pour explorer des univers bienveillants, oniriques, grâce au virtuel.

D’OUTSIDER à INSIDER-OUTSIDER

P. C. S. – J’ai toujours eu une démarche organique dans mes créations. C’est une façon d’avancer quasiment indestructible, qui a peu de défauts. Ma pratique artistique est ouverte, pour ne pas rester dans une seule case. Avec Gotan Project on mixait déjà le son et l’image, on cherchait de nouveaux challenges, etc. La période de la pandémie nous a donné un coup de fouet pour trouver de nouvelles solutions de diffusion, recréer l’idée du concert, de transmettre nos compositions. Le transmedia, et la VR, font partie de ce mouvement. J’y suis arrivé naturellement, en cherchant de nouvelles façons de proposer mes histoires au public. Et en souhaitant offrir quelque chose de très artisanal, ouvert, loin d’une idée futuriste de la réalité virtuelle réservée à quelques passionnés. INSIDER-OUTSIDER est l’aboutissement du projet OUTSIDER, le dernier segment qui amène le public au plus proche de ce que l’on veut offrir.

P. C. S. – Finalement c’est grâce à la rencontre avec Lucid Realities (Chloé Jarry, Alessandra Bogi) que s’est concrétisée l’idée d’une version VR d’OUTSIDER. Nous avons en commun une vraie passion pour l’art contemporain, et l’habitude d’incorporer différentes pratiques artistiques dans nos projets. Et puis je suis arrivé avec énormément de contenus déjà existants ! L’histoire, les images, les musiques… Le challenge restant était celui de tout transposer pour la réalité virtuelle, mais aussi d’envisager la musique comme un élément de l’interactivité – en explorant le champ des interactions musicales dans un espace narratif.

P. C. S. – L’idée a donc été d’amener tout notre travail sur OUTSIDER vers le médium de la réalité virtuelle. Il y avait un pont évident vers le travail de Darger, tourné vers l’irréel. Pour lui, le monde réel ne convenait pas. Il a traversé une vie terrible, avec peu de satisfaction sociale. Tout cela m’a inspiré pour créer une version immersive d’OUTSIDER, INSIDER-OUTSIDER, comme un pas de côté de ce qu’a fait Darger. C’est une intention qui peut être similaire à celle de créer un morceau de musique en s’inspirant de ce qu’on vient de voir, lire, etc. Le mélange des genres m’est toujours bénéfique.

Imaginer le concert de demain… en réalité virtuelle

P. C. S. – Jouer avec toutes ces possibilités d’interaction, de proposition au public, cela me fournit de nouvelles idées et perspectives. Encore une fois, l’idée de faire tourner le spectacle a des implications écologiques et personnelles importantes. Quand on voit ce que font Gorillaz avec la réalité augmentée (Gorillaz Presents) ou Travis Scott avec son concert sur Fortnite, ce sont des idées intéressantes de concerts immersifs. J’ai évidemment une passion immense pour les vrais concerts, les festivals, mais on peut trouver des idées complémentaires avec la technologie. En tout cas, il faut essayer de nouvelles propositions, pourquoi pas avec la VR, pour que parfois les œuvres circulent sans nous. Que cela touche un plus large public, et surtout le bon public.

P. C. S. – Aujourd’hui, un prototype d’ INSIDER-OUTSIDER existe et a été montré au Centre des Arts d’Enghien-les-Bains pendant les Bains numériques. Toutes les versions d’OUTSIDER existent désormais, et peuvent tourner ensemble ou séparément. C’est en réalité un vrai travail composite. Nous espérons prochainement le présenter également à Chicago, ville de naissance d’Henry Darger, entre autres destinations.

En savoir plus sur le site de Lucid Realities

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